lundi 29 octobre 2012

/:Tic tac tic tac (bis)






Se souvenir, plutôt se rappeler. Se rappeler est bien plus fort que se souvenir. Se souvenir c'est respirer un parfum de nostalgie, attraper quelques douces images qui flottent dans les limbes. Mais se rappeler c'est faire surgir quelque chose. Comme un antique galion pirate couvert d'algues sombres émerge à la faveur d'une marée. Se rappeler c'est revivre, faire un effort de précision et d'exactitude. On ne se souvient pas d'un mauvais souvenir, on s'en rappelle.


Qu'est ce que je fais là ? Qu'est ce que nous faisons tous là ? Tout le monde se posait ces questions. Et avoir la réponse ne la résout pas, cet endroit est si étrange. Une vieille battisse avec des couloirs froids au plafond desquels fleurissent humidité et moisissures. Des chambres individuelles avec plusieurs lits, des portes flambants neuves incrustées dans des murs décrépis. Une cours de ciment avec un peu d'herbe folle et des arbres faméliques. Durant l'automne leurs branches squelettiques semblent vouloir abriter la cour de la pluie, le sol est jonché de feuilles mortes en couche si épaisse qu'on croirait marcher sur un matelas visqueux. Une table en ciment se dresse au centre, tel un pitoyable ersatz d'autel sacré ou une désolante table de ping-pong. Durant l'automne son contact semble plus froid que la pluie, les murs humides, les grilles pétrifiés du portail ou les feuilles mortes gelées au petit matin. La cours est fermée par cette grille hermétique, en fonte, peinte en un noir qui s'écaille, dévoilant la rouille qui la ronge. Personne ne s'y accroche ou n'y passe des bras mendiant la liberté comme dans les films. Non, en réalité personne ne s'en approche. C'est trop dur, pourquoi s'approcher d'une porte si l'on ne peut la franchir ? Cette grille est comme un spectre grimaçant, un ennemi effrayant, un chien au bout d'une chaine que personne ne se risque à approcher et nullement un symbole de liberté ou d'évasion. A coté de cette grille se dressait un marronnier sombre et massif, le même genre de marronnier sinistre des cours d'école. Ses larges feuilles tombées au sol produisaient une pourriture particulière, formant des flaques brunâtres à moitié gelées et une raison de plus ne pas s'approcher de cet endroit. Depuis les chambres un large porche surplombait la porte qui menait à la cour. Cet abri permettait aux gens de fumer frénétiquement leur cigarette, soufflant sur leurs doigts glacés par le vent. Depuis la cours on apercevait les fenêtres de la cantine, une pièce que l'on aurait dit en plastique, couverte d'un lino vert pale et les murs peints en cette même couleur lénifiante. La soupe que l'on y servait le soir devait d'ailleurs avoir cette couleur. Je me rappelle y jeter autant de pain que je le pouvais pour me garantir un repas plus consistant.
N'est ce pas un endroit de fous ? Une bulle de non-lieu, un nul part, un n'importe où dans lequel rien ne ressemble à ce que l'on a connu "dehors". Il faut que des fous furieux fissent faire ces cités fantômes, farouches ferventes de la folie. Ces fous qui firent faire ces fourre-tout où s'enterrent des furies faméliques. Mais si ces fous construisent des maisons de fous pourquoi y met-on les fous ?




Image : Silent NPL by CruftForce7

vendredi 26 octobre 2012

Apnée




Dans une faille sous-marine les abimes déclinent, les messies amaigris dédaignent la plèbe sans rêves qui se traine en attendant son règne.
Les rampants et les bondissants, le fer du temps, les fils du vent, le fil dément. Une poussée énergique de conjonctivite, un tissu sous-entendu battu par l'écu invaincu. Dans une tasse sans anse, une danse sans classe, l'aimant coriace d'un amant tenace. Un cerf encerclé, un sang erre sans clés, une timide apatride s'entiche d'un chien qu'elle déniche.

La pensée et les idées ne sont qu'une affaire de priorité. Notre raisonnement suit des voies pré-déterminés. Certains critères d'analyse sont prioritaires, comme dans un centre de tri postal. Chaque message suit le même chemin. Notre cerveau est puissant, il suffit juste de changer l'ordre des "services" de tri. Détourner la raison, tordre la logique et éclairer nos pensées d'une lumière nouvelle. Qui sait, peut-être y verrons nous des choses qui nous avaient échappées.


La fumée







Lentement elle se dissipe, l'air la porte et l'emporte. Une nouvelle bouffée, de nouvelles inspirations, la lumière d'un briquet, quelques illuminations. Ce timide feu qui rougeoie porte un message de paix, l'esprit acquiert une nouvelle unité, les idées se transportent et se développent et la peur s'est envolé.
Chaque seconde voit naitre une idée, on n'a jamais le temps de toutes les attraper. C'est pourquoi quand ces instant me sont donnés j'en écrit le plus possible sur le papier.
Une cendre s'envole, hésite, puis retombe. Le fragile cône de papier plié git dans un cendrier encrassé. Un ami m'a un jour dit :"c'est le bonheur qui tiens dans une poche", je crois que je suis d'accord avec lui.
Ces volutes me fascinent, ces formes qui se dessinent, ces choses que l'on devine. Un nuage que l'on aurait la chance de pouvoir toucher, n'est ce pas là que finira cette fumée ?

Angoissante emprise, crise de délire, froid morbide et chairs qui se déchirent, chaines implacables, doigts froids et yeux noirs. Prison sans fond où hurlent les esclaves à l'unisson, cachots peuplés de corbeaux où s'entassent des milliers d'os. Visage sans yeux et mâchoires sans cœur qui hurlent lorsque l'on pleure.

Mes excuses pour ce moment froid, mais dans un soucis de sincérité certaines choses devaient êtres évoquées.

Je me rappelle de cette journée. Peu importe où je me trouvais mais j'ai passé quelques heures perché sur un rocher. C'était à la montagne, dans les Pyrénnées, au dessus d'une vallée. On croirait y voir jusqu'au bout du monde, un paysage sans fin qui donnait le tournis. En contrebas se trouvais un petit village, sur sa gauche une route serpentat sur la montagne dréssée comme une muraille. Droit devant moi s'élevait un pic massif aux flancs couvert de forets. Et encore plus loin derrière lui d'autres monts orgueilleux étaient dressés. Sur ma droite la muraille continuait, partant de ma gauche je m'y trouvais aussi, elle formait un arc de cercle jusqu'à la prochaine vallée. C'était en début de soirée, un temps orageux et un ciel lourd où néanmoins le soleil resplendissait avant de se coucher, le vent soufflait et mes yeux se perdait dans cette immensité. Je n'oublierais jamais cette journée.






Image : somebody by darkshines7