mardi 16 mai 2017

echo

L'échine courbé devant l'autel, le marbre trempé des larmes des supplicateurs. Que le temps se fige car nul n'a le pouvoir d'exaucer vos prières. Les bulles qui éclatent à la surface de vos pensées ne produisent aucun son.
Alors dans le creux de nos crânes, nous amplifions le moindre murmure, le moindre écho. Il nous semble entendre des voix familières, des commandements, des promesses. Elles se font assourdissantes à mesure que l'on y prête attention, comme un nuage de mouches autour de nous. Les dialogues se font interminables, un brouhaha constant qui gêne l'exécution de la moindre tâche. Même isolé de toute présence humaine on les entends rebondir dans nos têtes.
Parfois la cacophonie s'apaise, avec un peu de chance c'est une voix extérieur qui nous calme, distrait notre attention du tumulte. On découvre alors le monde avec une clarté nouvelle, comme celui qui porte ses lunettes pour la première fois. Nos pensées fonctionnent à nouveau, les idées s'enchainent logiquement, avec fluidité, une aisance et un naturel qui nous stupéfie.
Comme toutes les bonnes choses, le moment prendra fin. Suivra un bref moment de silence puis un petit grésillement se fera entendre. Il deviendra rapidement un bourdonnement, comme une grosse mouche. On y perçoit des irrégularités, des montées, des descentes, comme lors d'une conversation.
Et cela recommence, comme être dans un restaurant bondé en permanence, avec l'obligation de se taire.
Il y a d'autres moment où les voix se font moins désorganisées, car il arrive qu'elle remarque notre présence.
Et d'un coup tout le restaurant vous regarde.
Parfois on vous encourage, on crie votre nom avec des mots chaleureux et, bien que cela soit non désiré, la situation pourait-être pire.
Car on peut aussi vous insulter, lister vos défauts et vos erreurs, des listes sans fin de reproches et de regrets répétées jusqu'à la nausée. Les insultes peuvent même devenir des cris, des cris de haine, votre nom hurlé sur tous les tons pendant des heures. Jusqu'à ce que le temps ne soit plus qu'un interminable hurlement, un choeur qui se relaie pour anéantir la moindre trace de silence. Il chasse le sommeil, les gens qui vous entourent, des hurlements permanent dans lesquels on ne peut même plus distinguer le moindre mot.
Les voix de l’extérieur se font de moins en moins perceptibles, trop douces, trop lointaines, le nuage de mouches est trop épais.
Maudit soit le jour où j'ai écouté. Le jour où j'ai voulu savoir ce qu'était ce petit murmure que moi seul entendait.