jeudi 20 juillet 2017

Temps mort






Et le temps ne cesse de passer, il s'enfuit dès que je tourne la tête. Comme un enfant turbulent, à peine ai-je le temps de cligner des yeux qu'il a fait mille bêtises.

Il passe moins vite parfois, chaque seconde est lourde mais elles sont si nombreuses que je n'arrive plus à les compter. Je n'ose pas me retourner, je ne sais pas si je supporterai de voir le mur qu'elles forment derrière moi.

La perception change tellement avec l'âge, il fut un temps où je n'avais pas le temps, chaque année, chaque mois était chargé de choix, d'importance, alors que notre esprit est encore tout mou. Avec le recul je m'aperçois que la porte de l'enfer est dans ma classe, assise à côté de moi. J'aurais pu la franchir à plusieurs reprises, j'ai fait d'autres choix, plus ou moins éclairés, sans avoir conscience des périls qui nous entourent, de notre vulnérabilité.

Je n'avais pas peur, la mort, je l'avais vue, je l'ai regardée avec curiosité, comme un gros coléoptère à la carapace irisée.

J'y ai repensé il y a peu. Je me suis rappelé que tout finit un jour, et j'ai eu peur. J'ai eu peur de mon impuissance, de la fuite, de la perte. Mon sang s'est glacé, lorsque je m'éteindrais, d'autres s'allumeront à peine et s’élanceront à corps perdu dans ce nouveau monde, sans un regard pour celui qui refroidit derrière eux.

Non je n'ai pas peur de la mort, toujours pas, pas plus que je n'ai peur de la vie.

Mais le temps, l'horloger sadique qui nous coince dans ses engrenages, lui ne cessera jamais de me terrifier. Avec sa puissance démesurée, son pouvoir absolu sur nos vies, personne ne le vénère, personne n'ose lui adresser la moindre prière. Nous prions les vents, le ciel, les saisons, le soleil, le créateur ou la mort même parfois. Mais nul temple ne se dresse pour l'Horloge.






image : nagy-norbert-time-golem

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